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Famille Burkina Faso
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28 janvier 2009

Culture de l'oral, culture de l'écrit

La culture de l'oral est très présente et même lorsqu'il y a l'écrit, on retrouve l'oral comme dans cette article raconté comme un véritable conte dans un journal local :                                                           

" Il y a des gens qui ont de fortes curieuses manies quoi ! Quelqu'un qui ne peut pas voir son camarade prendre un médicament sans lui demander de lui en donner. Et ça c'est bien vrai lorsqu'il s'agit de médicament traditionnel : tu arroses ton plat de riz d'une poudre rouge parce que tu soignes tes maux de ventre, ton voisin qui te regarde se sent obligé de t'en demander. Tu mets de la poudre noire dans ta boisson, l'autre qui pense que c'est du «Kan-kan-kan» qui remonte monsieur t'en voudrait «malement» si tu ne lui en donnes pas même s'il n'a pas de projet immédiat pour «Bakari».                           

Le vieux Nossyandé, traduisez par «honte des poulets» partageait sa vie de paysan entre son champ et son activité de guérisseur traditionnel, donc qui s'y connaît en matière de poudres et de décoctions. Cet après-midi-là, Nossyandé qui habite le chef-lieu de province, s'était rendu dans un cabaret à dolo situé entre le commissariat de police et le marché : il y avait déjà sur les lieux cinq à six personnes qui toutes trempaient allègrement les lèvres dans les calebasses de dolo.
Lorsque vieux Nossyandé reçut sa calebasse, il la déposa devant lui, fouilla ses poches et en ressortit une boule de papier plastique. Il l'ouvrit et en préleva deux ou trois pincées d'une poudre qu'il mit dans son dolo. A peine eut-il fini de le faire, que tous ceux qui étaient là, lui tendirent leurs calebasses avec des sourires entendus comme pour dire «vieux, ta poudre-là doit faire du bien à l'homme, donne-nous-en car ce qui améliore les vieux, renforce les jeunes...». Vieux Nossyandé n'aimait pas cette manière de faire mais il se contient et versa dans les calebasses des uns et des autres de généreuses pincées de sa poudre. Les uns et les autres mélangèrent très bien le tout et burent bruyamment leur dolo ainsi assaisonné.
Le vieux, lui, n'avait pas touché à sa calebasse. Au contraire, il fit sortir de ses poches d'autres boules de la même couleur que celle de laquelle il avait prélevé le produit, les tournait et les retournait dans ses paumes l'air fort préoccupé. Puis d'une voix angoissé, il s'adressa aux autres : «j'espère que personne n'a encore bu son dolo ?...». A l'unisson ceux-ci lui répondirent par l'affirmative. Alors, vieux Nossyandé de leur dire d'une voix blanche : «c'est grave, car je me suis trompé de sachet. Ce n'est pas la bonne poudre que je vous ai donnée... comme les sachets se ressemblent, je me suis trompé... ce que j'ai mis dans vos calebasses est un poison ; un poison que j'ai fabriqué pour protéger mes récoltes...». Quelqu'un demanda si ça pouvait tuer un homme. Le vieux répondit que : «je ne vais pas vous mentir... ça peut tuer un homme vite vite...».
- Vieux, tu n'as pas le contre ?
- Non! il faut tout faire pour vomir ça... !
D'un même bond les buveurs se levèrent et se pressèrent derrière le cabaret où chacun, le doigt ou la moitié de la main profondément enfoncé dans la gorge, essayait de rendre à qui mieux mieux ce dolo empoisonné.
Resté seul, le vieux vida sa calebasse, et s'en alla sur sa vieille motocyclette non sans avoir dit à la vendeuse de dolo : «lorsque ces boukis-là reviendront, il faut leur dire que la poudre n'était pas du poison... c'était pour leur apprendre à se méfier de ce qu'ils ne connaissent pas !!» "
Derrière le cabaret, on vomissait, on toussait, et on se mouchait toujours avec douleur et bruits.

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