Fin de civilisation
Lu dans la presse locale
" Si
l'on en doutait encore, le passage en force du plan Paulson (250
milliards de dollars pour renflouer les banques américaines) est venu
nous convaincre que l'économie américaine et plus généralement celle
occidentale est rentrée en récession pour une période durable. Ce sont
en effet les sacro-saints principes d'un système (loi du marché, libre
entreprise, primauté du privé) qui sont ainsi remis en cause,
illustrant du coup sa faillite et préfigurant l'émergence de l'Asie
avec la Chine et l'Inde et accessoirement le Japon comme tête de proue.
Une décadence prévisible dans la mesure où la puissance de l'Occident
n'a jamais été bâtie sur ses propres forces (quoique s'agissant de
l'Amérique on puisse relativiser) mais sur la prédation économique et
politique. De l'esclavage à la colonisation, les héritiers des
vandales, des Goths, Wisigoths et autres barbares qui peuplaient
l'Europe antique, pendant que la civilisation noire égyptienne étalait
sa magnificence à travers les pyramides, ont toujours spolié les autres
pour faire fortune. Le siècle américain dont aiment tant se gargariser
les historiens, a été bâti sur cet impérialisme, avec dans un premier
temps "l'enferrement" de l'Europe par le biais du plan Marshall et dans
un second, l'envahissement de l'Asie avec l'American way of life. On
n'oubliera pas l'Amérique latine où les dictatures militaires ont servi
de relais à cette domination économique dont la plus grande victime
politique fut Salvador Allende au Chili. Les produits américains
inondaient ces parties du monde avec l'emblématique blue-jeans (nous
avons tous rêvé du Levi's 501 ou du Lee Cooper) et le Coca-cola comme
standards.
On a donc pu parler "d'homo coca-colens" pendant un
demi-siècle (1950-2000) jusqu'à ce que le réveil des tigres et autres
dragons asiatiques ne vienne lézarder le bel édifice.
Ce fut d'abord le Japon qui sonna la charge avec ses produits "hi-tech"
et ses automobiles moins chères et surtout très sobres (alors que les
grosses berlines Yankees pompent l'essence, les voitures nipponnes
elles en boivent modérément) avant que le réveil de l'ogre chinois sous
l'impulsion de Deng Xiao Ping ne vienne bouleverser la donne. Deng,
l'idéologue pur et dur, qui avait eu raison de l'héritier présomptif de
Mao, Lin Piao, avait compris qu'on ne vivait pas seulement d'idéologie
et d'eau fraîche. D'où son idée géniale de libéraliser l'économie tout
en maintenant la mainmise du parti sur les populations. Ordre,
discipline et travail, la recette a toujours fait des miracles, et, ce
pays d'un milliard et demi d'habitants ne pouvait pas faire exception à
la règle. Textiles, cosmétiques, produits alimentaires, haute couture,
les Chinois investissent dans tous les domaines avec des prix défiant
toute concurrence. Une offensive que pas même le scandale de la grippe
aviaire (en rappel, l'Asie et la Chine étaient surtout dans le
collimateur indexé comme zone "toxique") puis à présent, celui du lait
à la mélamine, n'est pas près d'arrêter.
Quand on ne vend plus, on rentre en récession et c'est ce qui arrive de
nos jours à l'Amérique et à l'Europe. D'autant plus que pour cette
dernière, la concurrence est rude en Afrique où les Chinois font plus
dans le pragmatisme, avec une aide débarrassée de toute arrière-pensée
paternaliste. On l'a vu en Angola et en RD-Congo et plus loin en Côte
d'Ivoire où les effets de cette aide commencent à se faire sentir.
(Construction d'infrastructures, régénérescence de l'Etat.)
L'Occident, qui ne veut pas assister les bras croisés à cette "mise à
mort" programmée, en est donc à renier ses propres principes. Cela ne
suffira pas pour autant à le sauver de cette déchéance, le rapport de
forces étant trop disproportionné. Plus que jamais, le soleil se lève à
l'Est."